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30 janvier 2010

Interview exclusive de l’artiste Elie Kamano depuis Dakar

Interview exclusive de l’artiste Elie Kamano depuis Dakar

«Tant que le peuple de Guinée  ne retrouve pas un bon dirigeant, je vais continuer à  dénoncer»

Quelques jours après le massacre du stade du 28 septembre, le reggæment guinéen Elie Kamano quittait brusquement Conakry pour le pays de la Teranga. Installé depuis trois semaines à Dakar, Elie travaillait au moment où nous l’avons rencontré, à la finition de son nouvel album consacré aux événements du 28 Septembre. C’est pendant les répétions qu’il a accepté de nous livrer ses impressions sur la crise que traverse la Guinée.

La Plume Plus : Pourquoi avoir quitté Conakry aussi vite après les douloureux événements du 28 Septembre ?

Elie Kamano : Après le 28 Septembre, j’ai été accusé de certains faits par l’auteur des massacres. Comme vous le savez sans doute, à la veille des événements j’ai fait un concert qui a rassemblé plus de 7000 jeunes. Mon concert n’avait pas de visage politique comme d’habitude. Mais malheureuse on m’a accusé d’être à la base de ce grand rassemblement. Et en plus, on m’accuse aussi d’être l’auteur des images que vous avez vu un peu partout dans le monde. Ils prétendent que j’ai été au stade déguisé en médecin de la Croix rouge pour prendre des photos que j’ai vendu. Et puis on m’accuse d’être avec Mouctar Diallo le leader des NFD (les nouvelles forces démocratiques) qui est un ami de longue date. Donc au cours des événements, il y a des journalistes qui m’ont appelé qui m’ont dit de quitter le pays parce que les militaires me rendaient responsable du rassemblement des jeunes au stade. J’ai reçu plusieurs appels de ce genre et donc je ne me suis pas entêté, j’ai quitté mon domicile cette même nuit du 28 septembre. Et c’est cette même nuit que des militaires sont passés chez moi. Mais je ne dirai pas que c’est le président Dadis qui a amené ces militaires parce qu’ils ne m’ont pas trouvé chez moi et donc, nous n’avons pas échangé. Mais je sais qu’avec ce que je fais je ne peux pas plaire à tous les militaires. Ces militaires sans attendre l’ordre de Dadis peuvent débarquer chez moi et faire leur sale besogne et dire que j’ai été attaqué par des bandits comme cela s’est passé avec Sader. C’est la raison pour laquelle je ne passais pas la nuit chez moi et j’ai préféré voyager dans un vol de jour pour que si on m’arrête cela puisse se passer  au vu et au su du peuple de Guinée.

La Plume Plus : Des rumeurs circulent à Conakry selon lesquelles vous chercheriez l’exil politique. Que répondez-vous à propos de ces rumeurs ?

Elie Kamano: Si je voulais aller en Europe par cette voie, je serai déjà parti au temps de Conté, parce qu’en ce temps j’avais tous les atouts. J’ai été le seul artiste à critiquer Alpha Wes en disant qu’il avait brisé sa carrière en choisissant  cette voie. Je pense que ce n’est pas une voie pour un artiste. J’ai déjà construit quelque chose en Guinée et je suis entrain d’élargir cela en Afrique, donc je ne vois pas la raison pour laquelle je vais m’exiler pour aller chez les blancs. J’ai reçu une invitation des amis qui ont vu sur le net que j’étais menacé et qui m’ont demandé de les rejoindre. J’ai même été à l’ambassade. Ils voulaient m’aider à quitter le pays en demandant l’exil ce que j’ai refusé. Les gens n’ont qu’à dire ce qu’ils veulent mais ce qui est sûr c’est que je ne suis pas prêt à lâcher le combat que j’ai commencé.

La Plume Plus : En quoi consiste ce combat ?

Elie Kamano : Comme tous les révolutionnaires du monde, de l’Afrique tels que Thomas Sankara, Patrick Lumumba ou encore Kwamé N’krumah, c’est des gens qui se sont battus pour le bien être de leur peuple. Tant que le peuple de Guinée  ne retrouve pas les vraies normes de la démocratie et un bon dirigeant, moi je vais toujours continuer à  dénoncer. C’est ça mon combat. Je ne peux pas parler des autres dirigeant pendant que dans mon il y’a la mauvaise gouvernance.

La Plume Plus : Depuis que vous êtes à Dakar est ce que vous avez reçu du soutien de la part des artistes guinéens et étrangers ?

Elie Kamano : Depuis que je suis au Sénégal des amis artistes partagent ce que je vis. Des personnes comme Awadi, des artistes guinéens qui vivent ici, la communauté Guinéenne, tout le monde me soutien. Déjà on m’invite dans les conférences et dans les manifestations qui concernent mon pays. J’y  vais pour donner mon point de vue. Cela ne veut pas dire que mes idées sont les meilleures mais en tant qu’artiste engagé j’ai des choses à dire.

La Plume Plus : Parlons à présent de cet album que vous enregistrez en ce moment .Est ce que vous parlez des événements du 28 Septembre ?

Elie Kamano : Bien sur, d’ailleurs c’est la raison pour la quelle je fais l’album. C’est parce que je ne peux pas me taire par rapport à tout ce qui se passe dans notre pays. Il fut un moment j’étais avec Dadis. Je suis le seul artiste que le gouvernement a appelé pour venir jouer au stade quand ils ont pris le pouvoir. Je suis arrivé, j’ai joué. J’étais dans leur esprit parce qu’ils étaient venus redresser les choses. Mais plus les choses avançaient plus je me détachais. Je suis parti rencontrer Dadis à deux reprises. Le problème est qu’aujourd’hui ce n’est pas la personne que je hais, mais c’est la politique que je déteste. La politique qu’ils sont entrain de mener n’est pas à l’avantage du peuple de Guinée. La motivation pour mon album vient de là. Pour moi ce que j’ai vu le 28 Septembre est inadmissible.

La Plume plus : Ne pensez vous pas que les leaders politiques ont une responsabilité dans les massacres du stade ?

Elie Kamano : Ça n’engage que les leaders politiques et ceux là qui sont partis derrière eux. Si les leaders n’étaient pas au stade je pouvais comprendre, mais ils y étaient. Même si c’était sans les membres de leurs familles. C’est leur lutte et c’est leur choix. Les leaders ont dit aux gens de sortir. Ils sont sortis et ils ont reçus des coups. Pourquoi dirai-je que les leaders sont responsables, je ne peux pas l’affirmer puisque je ne suis pas avec les leaders.

La Plume Plus : Ne pensez-vous pas que les différends ethniques constituent une face cachée dans cette crise que traverse le pays ?

Elie Kamano : C’est un problème très sensible. Dès que j’ai fait des commentaires ici dans un journal sur le tissu social, j’ai reçu des critiques genre : « Elie est contre les peuls, il fait de l’ethnocentrisme », on m’a accusé de tout. Mais si on ne fait pas attention ça va brûler entre les ethnies en Guinée et lesquelles ? Entre les peuls et les forestiers. Aujourd’hui les forestiers sont victimes de tous les maux de la part des peuls à cause de Dadis. Nous les forestiers, nous ne sommes pas tous dans l’esprit de Dadis. Il faut que les gens sachent faire la part des choses. C’est Dadis le problème, ils n’ont qu’à régler avec Dadis. Quand les forestiers aussi ont connu cela ils ont pris position et de sources sûres, il y a le recrutement de jeunes forestiers pour préparer une éventuelle réplique contre les guinéens.

La Plume Plus : Qu’avez-vous à dire au peuple de Guinée ?

Elie Kamano : Mes fans et le peuple savent que je ne les ai pas abandonnés. Je suis de cœur avec eux. C’est pourquoi je prends le temps de faire cet album, pour qu’ils sachent combien de fois je suis prêt à lutter, à lutter à leurs côtés même étant loin d’eux.

De notre correspondante à Dakar Mabinty Laye Soumah, 2e année au Centre d’études des sciences et techniques de l’information (CESTI) université Cheick Anta Diop de Dakar. mabinty79@yahoo.fr

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